20.06.2019 Nature 570,7761
-310-11 ; 349 – 53. ÉNERGIE SOLAIRE, CELLULE PHOTOVOLTAÏQUE SANS JONCTION, NANOTUBES, DISULFIDE DE TUNGSTÈNE, WS2.
Manu, Roger N.
Une cellule photovoltaïque d’un principe radicalement différent. Zhang et coll.
Ces temps, je m’intéresse aux cellules photovoltaïques. Stimulé par la visite à Christophe Baiffe au CSEM à Neuchâtel et par l’article rapporté ci-dessous (4.7.19, PP 38 et 90), je reprends un article d’un no. négligé le mois passé et je profite de placer une petite leçon sur les cellules photovoltaïques en général.
Un photon interagissant avec de la matière peut expulser un électron (-) laissant un trou (+) à la place. Normalement, en rien de temps, l’électron retombe dans son trou et on se retrouve au point de départ, juste un peu plus chaud à cause de l’énergie du photon ainsi dissipée. La recombinaison des trous et des électrons peut être évitée si l’effet photovoltaïque a lieu à l’intérieur d’un champ électrique qui tire l’électron d’un côté et le trou de l’autre. Il en résulte un courant électrique. Toutes les cellules photovoltaïques classiques au silicium (Si) utilisent, pour produire un courant électrique, le champ qui existe à la jonction entre un semi-conducteur de type n (dopé en charges -) et un semi-conducteur de type p (dopé en charges +).
Zhang et coll. partent d’un principe radicalement différent : l’effet photoélectrique de volume (BPVE – bulk photovoltaic effect). Ce phénomène, connu dès 1956, s’observe dans certains cristaux, selon certains axes particuliers qui n’ont pas de symétrie centrale (la symétrie du cristal est rompue par une inversion de 180°). Il en résulte qu’électrons et trous produits par des photons subissent des forces différentes selon la direction sur l’axe. Ainsi est généré un courant qui n’est pas dû à une différence de potentiel, mais à une rupture de symétrie droite-gauche – c’est, du moins, ce que j’ai compris. Le principe est étonnant, mais son utilisation pratique ne semblait pas prometteuse. L’effet est trop faible.
Le matériel typique dans lequel s’observe le BPVE est le disulfide de tungstène, WS2, qui à la propriété de se laisser peler en monocouches, un peu comme le graphite ou le graphène. Sans surprise, puisqu’on en parle ici, le pelage se fait perpendiculairement au fameux axe à symétrie rompue. Les auteurs ont étudié que devient le BPVE dans des monocouches ou des bicouches du cristal. Ils n’observent rien de très spécial. Et puis, ils étendent leur recherche aux nanotubes qui se forment spontanément à partir des monocouches. Ceux-ci peuvent être formés de une et beaucoup de couches ; ils ont de l’ordre de 0,1 µm de diamètre.
La découverte extraordinaire est que, dans ces nanotubes, le BPVE est plusieurs ordres de grandeur plus élevés que dans des cristaux 3-d classique ou en monocouches.Il en résulte le long des nanotubes un courant photovoltaïque substantiel. Les auteurs suggèrent que c’est la rupture de la symétrie due à la courbure des couches cristallines qui fait la différence.
La découverte est intéressante pour au moins deux raisons. (i) « Les courants topologiques » (peut-on les appeler ainsi) ouvrent un domaine de recherche dont je ne sais rien et, si je ne m’abuse, personne ne maîtrise actuellement. (ii) Verra-t-on un jour des cellules photovoltaïques à BPVE ? Selon la même ligne de réflexion qu’à la page suivante, la révolution du BPVE est peu probable, mais il est plus facile d’imaginer la combinaison de cellules au silicium avec des nanotubes BPVE. Encore une fois, le Soleil est la plus belle source d’énergie, physique et mentale.
Yang, M. M., & Alexe, M. (2019). Sunlight harvested by nanotubes. Nature, 570(7761), 310-311. Retrieved from https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/31217605. doi:10.1038/d41586-019-01767-6
Zhang, Y. J., Ideue, T., Onga, M., Qin, F., Suzuki, R., Zak, A., . . . Iwasa, Y. (2019). Enhanced intrinsic photovoltaic effect in tungsten disulfide nanotubes. Nature, 570(7761), 349-353. Retrieved from https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/31217597. doi:10.1038/s41586-019-1303-3
04.07.2019 Nature 571,7763
– 11. ÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE, CO2, VIANDE. GPclim.
Réduire la consommation de viande réduit considérablement l’émission de CO2. Exemple postsoviétique. Seven days, Trend Watch.
Il n’y avait pas de propriété privée en URSS. À la fin des années 80, Gorbatchev a tenté de libéraliser le système et de redistribuer le bien national à la population. On ne lui en a pas donné la chance. À la tête du nouvel État russe dès 1991, Yeltsine et sa bande ont détourné ce bien à leur propre profit. La population s’en est trouvée extraordinairement appauvrie. La production agricole a dû être transformée en une agriculture de subsistance. Ainsi, la consommation de bœuf, qui était 4 fois la moyenne mondiale, s’effondra dans la dernière décennie du siècle. Conséquence : l’émission de CO2 liée à la consommation de viande a diminué d’un facteur deux (0.27 GT). Je ne sais pas ce qu’était l’émission totale de CO2 de la Russie à cette époque, mais cette valeur correspond à 20% de l’émission actuelle du pays (1.44 GT). Conclusion : pour le climat, il est vraiment efficace de réduire la consommation de viande.
– 20 – 23 ÉTHIQUE, FINANCE, CONFLIT D’INTÉRÊTS, SCIENCES HUMAINES.
Les psychologues ont-ils un problème de conflit d’intérêts ?T. Chivers
Depuis que je suis devenu célèbre, je reçois pour mes interventions de quoi couvrir mes frais, souvent quelques bonnes bouteilles et parfois un souvenir symbolique. Excellentes prémisses à l’engagement public d’un scientifique.
Une fois, j’ai reçu 1000 fr. pour parler de « l’histoire d’un gamin qui a eu de la peine ». C’était à un congrès médical; chez les médecins, on paie les conférenciers ! Il faut dire que derrière les rencontres médicales, les intérêts financiers sont rarement bien loin. Est-ce pour cette raison que les résultats publiés dans la littérature scientifique médicale sont si peu reproductibles ? Est-ce aussi pour cette raison que la réputation scientifique de la médecine est sans doute plus médiocre que celle des autres sciences expérimentales ? Probablement ! La science souffre quand elle nage dans l’intérêt mercantile.
Jusqu’ici, j’imaginais les sciences humaines assez distantes de ces problèmes – elles en ont d’autres. Le présent article montre qu’il faut revoir cette opinion. Il y est montré que les chercheurs de la psychologie et de la sociologie sortent de plus en plus souvent de leurs terrains de recherche pour présenter leur travail au public. En principe, ce n’est pas moi qui vais m’en plaindre, mais le problème est qu’ils se font payer et ils se font payer cher – 10’000 à 100’000 francs par interventions – et que, jusqu’ici, presque personne n’y voyait un conflit d’intérêts. Pourtant, cas typique, que faut-il penser du spécialiste de l’effet de l’addiction au web sur le développement des enfants lorsque la présentation est payée par une firme de jeux vidéo ? Apparemment, cette situation est devenue courante dans les sciences humaines. C’est aussi une situation inflationnaire, car, une fois la tendance amorcée, chacun veut s’y mettre. Le mérite du bénévolat s’effrite quand certains le réécrivent à leur façon.
Heureusement, une réaction se dessine. Elle ne va pas rétablir complètement la situation, mais elle va la clarifier. Les journaux sérieux commencent à demander que le payement reçu pour une prestation publique soit déclaré comme un conflit d’intérêts. Bien sûr, la définition qu’il faudra donner à « conflit d’intérêts » sera compliquée à établir. Elle sera elle-même la source de conflits. L’article en donne quelques exemples actuels.
La mainmise des intérêts personnels et financiers sur la recherche est toujours détestable. On ne va pas la faire disparaître, mais en prendre connaissance est un bon début et la déclaration du conflit d’intérêts dans chaque publication de recherche est un garde-fou nécessaire.
Chivers, T. (2019). Does psychology have a conflict-of-interest problem? Nature, 571(7763), 20-23. Retrieved from https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/31267062. doi:10.1038/d41586-019-02041-5
-38-39, 90-94. ÉNERGIE SOLAIRE, CELLULE PHOTOVOLTAÏQUE, RENDEMENT, TETRACÈNE. Manu, Roger
Un joli truc pour augmenter le rendement des cellules photovoltaïques.
Au soleil, le rendement théorique des cellules photovoltaïques au silicium ne peut dépasser 30 %. Cela provient d’abord du fait que la cellule ne peut convertir que 1.1 eV (infrarouge) de l’énergie d’un photon capté. Le reste est perdu en chaleur. Pour un photon jaune (2eV), c’est 45% d’énergie qui est sacrifiée, pour un photon violet (3ev), c’est 63%. Dommage !
Le truc discuté ici consiste à couvrir la cellule, par exemple, d’une couche de tétracène (il s’agit d’une molécule formée de 4 noyaux benzéniques alignés). Cette substance a la propriété d’avaler un photon à haute énergie et d’en restituer deux d’énergie moitié. Ceux-ci peuvent alors être envoyés dans la jonction au silicium qui en tirera le meilleur parti. Théoriquement, on devrait gagner un facteur 1,4.
Il y a quelques jours, le professeur Christophe Baiffe m’a fait l’honneur de son laboratoire de Neuchâtel (CSEM) où il développe les cellules photovoltaïques d’aujourd’hui et de demain (merci pour l’accueil). On le sait, et Roger Nordmann l’explique clairement dans son livre (Nordmann, R. (2019) Le plan solaire et climat. Lausanne: Éditions Favre.), la voie photovoltaïque est la solution, toute mûre aujourd’hui, pour alimenter très vite et au meilleur coût la Suisse – et le monde – en énergie abondante et durable. Il ne faut pas s’attendre à des révolutions techniques, mais on peut être raisonnablement certain que les développements en cours – comme celui du présent rapport ou d’autres tels que les cellules multicouches ou les pérovskites – continueront de diminuer le prix et d’améliorer la commodité de la
voie solaire.
Reste à nous de décider ce que nous voulons en faire. Qu’est-ce qu’on attend ?
Luther, J. M., & Johnson, J. C. (2019). An exciting boost for solar cells. Nature, 571(7763), 38-39. Retrieved from https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/31270487. doi:10.1038/d41586-019-02014-8
Einzinger, M., Wu, T., Kompalla, J. F., Smith, H. L., Perkinson, C. F., Nienhaus, L., . . . Baldo, M. A. (2019). Sensitization of silicon by singlet exciton fission in tetracene. Nature, 571(7763), 90-94. Retrieved from https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/31270480. doi:https://doi.org/10.1038/s41586-019-1339-4
11.07.2019 Nature 571,7764
– 151, 155. CLIMAT, PROCÈS, ATTRIBUTION, VAGUES DE CHALEUR, France GPclim
Les procès contre l’inactivité des États se multiplient.
En mai de cette année le compte atteignait 1328 procès dont les ¾ aux États-Unis. De plus en plus les plaignants se basent sur la « science des attributions – attribution science » dont l’objet est de déterminer le rôle qu’il faut attribuer au dérèglement anthropique dans chacun des évènements climatiques. Par exemple, il est conclut que la vague de chaleur du 26 – 28 juin en France (record national de 45,9° à Gallargues-le-Montueux) a été rendue 5 fois plus probable par l’échauffement climatique. Cette science en est à ses débuts et les résultats actuels sont sans doute trop conservatifs, car ils n’incluent que les données primaires, l’attribution anthropique en est ainsi sous-évaluée. On parle alors non pas d’un facteur 5, mais peut-être 100. Les météorologues commencent à inclure ces données en temps réel dans leurs bulletins. Il paraît que le public aime beaucoup ça.
Beaucoup de choses seront différentes quand l’indice d’attribution sera suivi avec la même passion que le SMI, le CAC 40 ou le Dow Jones. C’est peut-être pour bientôt.
-183 – 92. VIEILLISSEMENT, SANTÉ, MÉDECINE. Tous
Depuis les découvertes sur le vieillissement jusqu’à la médecine du vieillissement en bonne santé.
Harari parle beaucoup d’un avenir d’immortalité (Harari, Y. N. (2017). Homo Deus.
Une brève histoire de l’avenir Paris: Albin Michel.) On n’en est pas là, mais la recherche visant à prolonger la vie en bonne santé attire beaucoup de monde et beaucoup de sous. Le point avec ce gros article.
J’en tire quelques éléments.
- Avec l’âge, toutes sortesde maladies deviennent plus fréquentes. Alors, on les soigne, l’une après l’autre, comme on peut. Le présent article voit les choses différemment :
Avec l’âge, on attrape une mauvaise maladie, la sénescence, et son lot de de maux. Pour certains, la sénescence est précoce, pour d’autres, elle est tardive. Une fois frappé, il est un peu vain de s’attaquer à une maladie particulière, les autres sont déjà dans le pipe-line. Ce qu’il faut, c’est éviter la sénescence ou la soigner. - Alors on cherche ce qu’est la sénescence, chez elegans(un petit ver) autant que chez l’homme. On trouve des gènes ; actuellement, on en a 800 dont quelques rares ont un effet notoire. On identifie des chemins métaboliques. Ainsi, on sait que réduire l’apport de nourriture prolonge la vie. Sans surprise on apprend que les radicaux libres ne sont pas bons – sauf qu’il y a toujours quelqu’un qui prouve le contraire. Etc.
- Comme on est pressé, on met beaucoup d’efforts à trouver des thérapies contre la sénescence. L’article décrit 5 substances à effet ± démontré. L’une d’entre elle est l’aspirine. Évidemment, les tests sérieux sur l’homme sont difficiles. Notons toutefois le cas intéressant de la Metformin utilisée dans certains diabètes. Ceux qui la prennent longtemps ont une espérance de vie plus grande que les personnes en bonne santé qui ne la prennent pas.
- Vient alors naturellement le rush incontrôlé sur tout ce qui se prétend utile. L’article appelle à la retenue. Il rappelle que deux autres thérapies sont démontrées efficaces : le sport en dose modérée et une alimentation judicieuse dont, malheureusement pour la Fête des vignerons, le vin n’en fait pas partie.
Campisi, J., Kapahi, P., Lithgow, G. J., Melov, S., Newman, J. C., & Verdin, E. (2019). From discoveries in ageing research to therapeutics for healthy ageing. Nature, 571(7764), 183-192. Retrieved from https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/31292558. doi:10.1038/s41586-019-1365-2
-193 – 197. CRISE DU CLIMAT, CONFLITS, GUERRE Les courageux de GPclim
Le climat en tant que facteur de risque pour les conflits armés.
À nous, préoccupés par la crise du climat, il semble évident qu’elle va devenir, si elle ne l’est pas déjà, une source majeure de terribles conflits. Est-ce vraiment le cas ? Le présent article conclut que, jusqu’ici, le changement climatique n’a eu qu’une influence mineure sur les conflits armés dans le monde.
D’abord un mot sur la méthode. Les auteurs sont 11 experts connus des problèmes climatiques ou de la science des conflits. Ils sont encadrés par 3 « facilitateurs ». Ces 11 experts ne sont pas d’accord entre eux et ils n’ont pas les données pour arriver à une réponse consensuelle. Que fait-on alors pour arriver à une réponse ? On utilise la méthode « Expert elicitation » (https://en.wikipedia.org/wiki/Expert_elicitation).
De cette façon, le groupe arrive à la conclusion que pour les conflits nationaux le rôle du climat est fort peu de chose par rapport à d’autres variables dont les plus importantes sont : (i) le développement socioéconomique (ii) la capacité de l’État (iii) l’inégalité intergroupe (figure), etc. Comme on le voit, le rôle du climat est minuscule, juste avant la géographie physique et, dernier, l’inégalité des revenus (Piketty serait enthousiaste).
Qui a raison, eux ou nous ? Disons que :
- Il est bon de repenser à ce que valent nos certitudes. Est-il possible que l’idée selon laquelle le climat joue un rôle déterminant dans les conflits actuels – je dois avouer mon incompétence – soit à ajouter à la galerie des fausses idées préconçues ?
- Disons aussi que les auteurs sortent des meilleures institutions.
- Mais, j’ai quand même quelques problèmes avec cet article. Ainsi, on y parle beaucoup de « Conflict drivers » – générateur de conflits ( ?) – mais peu des confits eux-mêmes. J’aurais aimé comprendre comment ces experts réfléchissent, par exemple, à ce qui se passe en Somalie ou en Irak.
- En général, on aimerait que la relation entre conflit et conflict-driver soit rendue aussi quantitative que possible. Cela ne peut se faire que par l’étude des paires une à une. Sur la figure, les variables sont arrangées selon une seule dimension. Il faudrait au moins une matrice à 2 dimensions. Ainsi, au Sahel, si, selon la figure, la pression de population est évaluée comme un paramètre d’importance moyenne, cet effet est certainement influencé par la sécheresse qui, elle, est prétendue d’importance mineure. Une considération semblable devrait être faite pour toutes les paires de variables. Mieux encore qu’une matrice serait un réseau de liens pondérés.
- Le texte est plus riche que ce qui semble ressortir des figures. Est-ce dû à cette tentative de vouloir être quantitatif alors que les données ne sont que qualitatives?
Ma conclusion inquiète, soutenue par quelques expériences privées originales, est que, en l’absence de données objectives, la recherche du consensus entre experts est un chemin bien tortueux. Comme dit l’autre (Wittgenstein ?) « Si tu n’as rien à dire, commence par te taire »
Mach, K. J., Kraan, C. M., Adger, W. N., Buhaug, H., Burke, M., Fearon, J. D., . . . von Uexkull, N. (2019). Climate as a risk factor for armed conflict. Nature, 571(7764), 193-197. Retrieved from https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/31189956. doi:10.1038/s41586-019-1300-6
Une plaisante nouvelle, vue dans The Guardian.
A group of wealthy US philanthropists and investors have donated almost half a million pounds to support the grassroots movement Extinction Rebellion and school strike groups – with the promise of tens of millions more in the months ahead.
https://thebulletin.org/2019/07/philanthropists-promise-big-money-to-grassroots-climate-activists/?utm_source=Newsletter&utm_medium=Email&utm_campaign=Newsletter07222019&utm_content=ClimateChange_Philanthropists_07142019,
Nouvel appel des « World Scientists’ Warning of a Climate Emergency ».Déjà près de 200’000 signatures. Merci d’y jeter un oeil.
http://scientistswarning.forestry.oregonstate.edu/
Ripple, W. J., Wolf, C., Newsome, T. M., Galetti, M., Alamgir, M., Crist, E., . . . Laurance, W. F. (2017). World Scientists’ Warning to Humanity: A Second Notice. BioScience, 67(12), 1026-1028. doi:10.1093/biosci/bix125
18.07.2019 Nature 571,7765
– 151, 155. CLIMAT, TEMPÉRATURE, BUDGET CARBONE . Aussi les courageux de GPclim.
Estimer et suivre le budget carbone restant pour tenir les objectifs de Paris. Un article pour ceux qui veulent avoir une base un peu plus solide concernant les affirmations des journaux sur la limite à ne pas dépasser. L’article est aride, mais il aide à penser. Markus. Comité sci. de GPclim.
Combien de CO2 pourrons-nous encore déverser dans l’atmosphère si nous voulons tenir les 1.5° ou les 2° définis par la COP 21 ? Ce nombre est essentiel pour la politique du climat telle qu’elle est en train de se constituer au niveau mondial (l’ONU a besoin de ce chiffre) ou local (ma ville de Morges travaille à l’établissement de son plan climatique). En fait, il faut constater que nos connaissances sont insuffisantes, mal unifiées et, surtout, les incertitudes sont considérables. Les meilleurs spécialistes font ici le point.
Petite constatation préliminaire – et amusante – pour illustrer la difficulté d’obtenir les bonnes données. Il s’agit de connaître l’évolution de la température de la mer (très importante pour ajuster les modélisations du climat.) Les mesures montrent que, dans les années 1920 à 1940, alors que l’Atlantique Nord continuait à se réchauffer, la température du Pacifique Nord était stable, ou même décroissait légèrement. L’article de Chan et al. et son analyse par Z. Hausfather reprennent ces données. Ils concluent, évidences à l’appui, que la stabilité apparente de la température du Pacifique Nord est un artéfact de mesure. Il faut savoir que la courbe moyenne de température est déterminée à partir d’innombrables mesures effectuées par les navires en mer. Ces mesures s’effectuent en déterminant la température de l’eau fraîchement prélevée dans une seille. La seille de toujours était en bois, de dimension relativement standard. Arrivent les récipients en plastique. Ils sont moins normalisés et moins isolants. Les Japonais n’ont pas maîtrisé cette variable. Les Américains US et les Européens ont fait mieux.
Le livre de Martine Rebetez donne d’autres exemples de la difficulté des mesures climatiques.
Revenons à l’article de Rogeli et coll. discutant le bilan carbone restant pour tenir les 1,5, resp. 2,0°C que demande la COP21. Tout est dans la formule :
Blim = (Tlim– Thist– TnonCO2-Tzec) / TCRE – EEsfb,
mais chaque terme est compliqué et nécessite les nombreux commentaires qui font la substance de ce long article.
Blimest, exprimé en Gt (G = 109) CO2, le budget carbone restant pour atteindre Tlim., la température de l’air au sol à laquelle on veut limiter l’échauffement, c’est-à-dire soit 1,5°, soit 2°C.
Thistest l’échauffement anthropique qui a déjà eu lieu (à peu près 1°C)
TnonCO2est la contribution de toutes les autres causes anthropiques, y compris le méthane, les microparticules ou les traces des avions. Les auteurs ne lui donnent actuellement pas un poids considérable ; de l’ordre de 0,1 ± 0,1°C pour la limite de 1,5°C, le double pour 2°C.
Tzecest ce qu’ils appellent le « zero-émission commitment » c’est-à-dire l’élévation de température qui viendra encore après que l’on ait cessé de verser le CO2 dans l’atmosphère. Les auteurs du présent article concluent que Tzecn’est probablement pas grand-chose ou pourrait même être négatif.
J’utilise souvent la métaphore du grand bateau qui s’est mis à virer parce que son gouvernail est abîmé. Je laisse entendre qu’il faudra autant d’efforts pour arrêter sa rotation qu’il en a fallu pour la mettre en route. Au vu du présent article, cette image est sans doute fausse. Dans ma métaphore, il faut imaginer que le bateau cesse de tourner dès que l’on a cessé de verser du CO2 dans l’atmosphère. Tant mieux ! Cela ne veut évidemment pas dire qu’on sera revenu à la situation préindustrielle quand on aura cessé de brûler les réserves d’hydrocarbures.
TCRE est le facteur de proportionnalité entre la quantité de CO2 injecté et l’élévation de température. C’est la réponse climatique induite par l’injection de 1 Gt de CO2. La valeur donnée ici est de 0,45°/Gt. L’ incertitude (sigma) est considérable, elle est estimée à 0.25°/Gt. D’après les auteurs, la réponse entre TCRE et l’élévation de température est linéaire, même bien au-delà du domaine de température considéré ici (prend note, Markus) (exclusion faite des éventuels phénomènes inclus dans le terme additionnel EEsfb).
Reste ce terme EEsfbdont on ne sait à peu près rien, mais dont on parle beaucoup. Il s’agit des effets de feed-back que pourrait produire l’effet premier du CO2. On pense, par exemple, à l’augmentation de température qui fait fondre le permafrost, qui libère du méthane, qui fait monter la température, et ainsi de suite en cercle vicieux. Au contraire, la fonte des glaces du Nord pourrait changer les courants océaniques, freiner le Gulf Stream et finalement refroidir l’Europe. Avec de tels phénomènes, la proportionnalité entre la concentration en CO2 et l’élévation de température est rompue. Heureusement, jusqu’à nouvel avis, ce n’est pas ce que l’on observe ; les données continuent de valider la proportionnalité. De ce fait, les auteurs donnent à EEsfb une valeur nulle. Il faut s’attendre à ce que cela change dans l’avenir… mais quand ? Le plus tard possible SVP.
Brève conclusion. Actuellement, la combustion des hydrocarbures produit de l’ordre de 30 Gt CO2 par année. Selon les présentes estimations, nous avons 50% de chance de tenir les 1.5° si Blim est limité à 480 Gt, mais à 320 Gt, on a déjà 1 chance sur 3 d’atteindre la limite. Pour 2°, le 50% est à 1400 Gt et 1/3 de (mal-) chance à 1070 Gt.
En continuant comme maintenant, le 1.5° est pour dans 15 ans ± toutes les incertitudes discutées dans cet article.
Les grévistes du climat sont plus réalistes que l’initiative des glaciers
Chan, D., Kent, E. C., Berry, D. I., & Huybers, P. (2019). Correcting datasets leads to more homogeneous early-twentieth-century sea surface warming. Nature, 571(7765), 393-397. Retrieved from https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/31316195. doi:10.1038/s41586-019-1349-2
Hausfather, Z. (2019). Corrections to ocean-temperature record resolve puzzling regional differences. Nature, 571(7765), 328-329. Retrieved from https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/31316191. doi:10.1038/d41586-019-02147-w
Rebetez, M. (2002, 2011). La Suisse se réchauffe.
Effet de serre et changement climatique. Lausanne: PPUR.
Rogelj, J., Forster, P. M., Kriegler, E., Smith, C. J., & Seferian, R. (2019). Estimating and tracking the remaining carbon budget for stringent climate targets. Nature, 571(7765), 335-342. Retrieved from https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/31316194. doi:10.1038/s41586-019-1368-z
25.07.2019 Nature 571,7766
– 487 – 8, 500 – 4. PALÉONTOLOGIE, H. SAPIENS, H. NEANDERTALENSIS, EUROPE.
L’H. sapiens européen prend un grand coup de vieux.
Le plus vieux fossile d’H. sapiens est africain, marocain. Il date de 315’000 ans. Puis l’espèce s’est répandue dans toute l’Afrique. Son arrivée en Europe il y a environ 50’000 est bien documentée.
Mais voilà qu’une grotte grèque révèle un fossil d’homme moderrne datant d’il y a 260’000, soit 160’000 ans plus vieux que le plus vieil H. sapiens européen connu jusqu’ici. Dans la même grotte, on a trouvé les restes d’un de Néandertal 40’000 ans plus jeunes.
On ne s’en étonne pas. Il serait prétentieux de croire que que l’on sait déjà tout alors qu’il reste tant de trous à creuser. Il n’empèche que, vieillir notre famille européenne de 160’000 ans d’un coup, c’est beaucoup.
Delson, E. (2019). An early dispersal of modern humans from Africa to Greece. Nature, 571(7766), 487-488. Retrieved from https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/31337897. doi:10.1038/d41586-019-02075-9
Harvati, K., Roding, C., Bosman, A. M., Karakostis, F. A., Grun, R., Stringer, C., . . . Kouloukoussa, M. (2019). Apidima Cave fossils provide earliest evidence of Homo sapiens in Eurasia. Nature, 571(7766), 500-504. Retrieved from https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/31292546. doi:10.1038/s41586-019-1376-z