Canicule.
Pour cette année, il est probable que nous soyons sortis de la saison des canicules. Dans quelques mois, l’Office fédéral de statistique nous dira combien de personnes en sont mortes.
C’est comme ça, la chaleur tue, mais combien en faut-il ? Ceux qui connaissent le sauna savent que, pendant un moment, nous résistons à une surprenante haute température, mais qu’un peu d’humidité la rend rapidement insupportable. Qu’en est-il de la réalité quotidienne ?
En Suisse, les alertes canicules sont définies par l’Institut de médecine tropicale de Bâle sur la base de la température moyenne de la journée (Tmean) telle que mesurée par Météo suisse. Le tableau ci-dessous est utilisé.
En réalité, on n’en sait pas grand-chose parce que les mesures n’existent pas. Dans un récent « News in focus » de Nature, Carissa Wong fait le point.
Nature 632, 713-715 (2024), doi: https://doi.org/10.1038/d41586-024-02422-5
On y apprend que ce n’est qu’en 2020 que la première chambre d’expérimentation humaine a été mise en service. Depuis lors, les données quantitatives sur la résistance des humains à la chaleur et des moyens de les protéger de ses effets néfastes arrivent de différentes sources. Jusqu’ici, il était convenu de se baser sur une étude théorique de 2010 qui concluait que 35°C représente la limite de la survie humaine. Les récentes données sont plus sévères et plus différenciées : 26-34°C pour les jeunes adultes en bonne santé et 21-34 pour les personnes âgées.
La nécessité d’un effort mondial pour faire face aux canicules que l’échauffement climatique va rendre de pis en pis est une exigence vitale. Contrairement au point de vue du Parlement suisse, notre pays n’y échappera pas.
Thomas Piketty…
… donnera une conférence à Lausanne le 3 octobre de 13-15h à l’Amphimax de l’UNIL.
https://events.unil.ch/register/332.
J’aime beaucoup Thomas Piketty, l’économiste-historien qui a répondu à cette vieille question : « il y a des gens très, très riches dans le monde, mais ils ne sont pas nombreux ; pour autant, sont-ils importants ? Piketti répond « oui « , et il le prouve. Sa réponse est documentée par l’histoire et les faits rapportés dans trois gros bouquins :
Piketty, T., Landais, C., & Saez, E. (2011). Pour une révolution fiscale. Un impôt sur le revenu pour le XXIe siècle. Paris: Éditions du Seuil.
Piketty, T. (2013). Le capital au XXIe siècle: Paris : Éditions du Seuil.
Piketty, T. (2019). Capital et idéologie. Paris: Éditions du Seuil.
Ainsi qu’un « résumé » de 351 pages ,
Piketty, T. (2021). Une Brève Histoire de l’Égalité. Paris: Éditions du Seuil,
dont j’ai précédemment recommandé la lecture sur mon blogue le 15 septembre 2023.
En attendant la conférence du 3 octobre, la récente chronique publiée le 14 septembre dans Le Monde sous le titre « Mario Draghi a raison, l’Europe doit investir » nous met à niveau.
Piketty fait ainsi référence au rapport que la Commission européenne avait commandé il y a un an et qui a été rendu public le 9 septembre. Mario Draghi, ex-président de la Banque centrale européenne (et ex-Premier ministre d’Italie), conclut sombrement que la politique d’économie destinée à réduire la dette de l’Europe conduira à sa lente agonie face aux États-Unis et en Chine. Il propose au contraire d’investir massivement, plus que jamais jusqu’ici, trois fois plus que le plan Marshall après la 2e guerre mondiale, autant que ce qui a été libéré pour le Covid, non pas pour un ou deux ans, mais durablement. Les tenants de la doxa financière disent que c’est impossible ; en réalité, il s’agit d’un simple jeu d’écriture sur des ordinateurs alors que les défis du réchauffement climatique, de la santé publique et de la formation ne se régleront pas d’un simple trait de plume. »
Ainsi Piketty s’associe à l’exigence d’investir massivement que formule Draghi. Il s’en éloigne quand il s’agit de choisir comment dépenser tout cet argent. Sans surprise, Draghi vise une « approche technophile, marchande et consumériste.» Il appelle quand même à soutenir un peu le secteur public, mais d’une manière élitaire, par exemple en finançant généreusement quelques universités de pointe ou de brillants domaines de recherche – peut être la fusion nucléaire ou les centrales nucléaires de nouvelles générations ? La médecine est quasiment oubliée.
Quant à ce que propose Piketty, vous pouvez le deviner. Vous aurez la réponse lors de sa conférence du 3 octobre.
Je me réjouis de vous y rencontrer.
L’aventure spatiale tourne à la folie commerciale.
J’ai déjà dit tout le mal que je pense d’Elon Musk. Il y a récemment ajouté une folle couche en prétendant viser une expédition humaine sur Mars dans 4 ans !
On aimerait en rire. Il n’empêche que c’est lui qui décide l’usage qui sera fait de sa super-fusée. Dans peu d’années, Mars ne sera probablement pas hors de sa portée. Ce qui le sera c’est d’assurer la sécurité des astronautes – c’est leur problème – et l’assurance qu’il n’y aura pas de contamination Terre/Mars ou Mars/Terre – ce qui est l’affaire de tous les vivants. Le rire ici n’est plus de mise.
Saura-t-on agir à temps pour nous garder de ces folies ?
Malheureusement, Musk n’est pas seul avec ses élucubrations. Dans ma revue préférée, il est habituel de trouver dans chaque numéro plusieurs articles sur le cancer (le plus souvent, je n’y comprends pas grand-chose), et à peu près autant qui sont basés sur la cryomicroscopie électronique (ce qui me réjouit). Mais voilà que, tout à coup, un nouveau domaine prend une importance comparable ; le spatial. J’en veux pour preuve trois gros articles publiés dans le no 29 août qui démontrent la vitalité du domaine spatial et la pluralité des intérêts qu’il recouvre.
Mason, C.E., Green, J., Adamopoulos, K.I. et al. A second space age spanning omics, platforms and medicine across orbits. Nature 632, 995–1008 (2024). https://doi.org/10.1038/s41586-024-07586-8
Jones, C.W., Overbey, E.G., Lacombe, J. et al. Molecular and physiological changes in the SpaceX Inspiration4 civilian crew. Nature 632, 1155–1164 (2024). https://doi.org/10.1038/s41586-024-07648-x
Overbey, E.G., Kim, J., Tierney, B.T. et al. The Space Omics and Medical Atlas (SOMA) and international astronaut biobank. Nature 632, 1145–1154 (2024). https://doi.org/10.1038/s41586-024-07639-y
L’essentiel est dit dans figure ci-dessous tirée du premier de ces articles.
Fig. 1: A historic overview of space launches.
Inset, the launches that defined the first space age, from 1957 to 2022, broken down by country of origin. Main, the exponential increase in the number of launches per year, increasingly driven by commercial launches, marks the second space age.
Les deux autres de ces articles constatent aussi la croissance exponentielle du nombre de lancements et des multiples plans visant à développer des stations spatiales en orbite terrestre, sur la Lune et sur Mars. Dans de telles conditions, la vie des équipages et leur santé se révèlent un problème beaucoup plus compliqué qu’on ne l’avait imaginé. Il est urgent d’y travailler. Visiblement, les moyens n’y manquent pas.
Halt ! Revenons sur Terre. Notre monde en dépend.